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Les Amis de l'Ecole de Rouen

Nouveau site de l'Association

21 Août 2023, 13:10pm

Publié par le webmaster

 

Vous pourrez continuer à nous suivre sur notre nouveau site

https://peintresecolerouen.blogspot.com/

Tous les articles de ce site y seront progressivement transférés

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A PROPOS d’un DESSIN DE ROBERT ANTOINE PINCHON…

27 Février 2022, 11:42am

Publié par le webmaster

A PROPOS d’un DESSIN

DE ROBERT ANTOINE PINCHON…

 

Il est toujours plaisant devant une œuvre d’un artiste, de mettre un juste titre, une date aussi précise que possible et de tenter d’élucider dans quel contexte cette oeuvre a pu être réalisée.

C’est le cas précis de cette petite feuille de Robert Antoine Pinchon (1) (1886-1943) de  15,5 par 19 centimètres représentant la côte Sainte-Catherine, qui domine Rouen à l’Est de ses 130 mètres d’altitude avec une immense croix, dessin rapide et sombre notation, signée en bas à droite.

 

La première guerre mondiale a été un des conflits les plus meurtriers ; le 2 août 1914, a lieu la mobilisation générale ; le lendemain, l’Allemagne déclare la guerre à la France. Le conflit prend fin avec l’armistice le 11 novembre 1918 à Rethondes, à 6 Heures du matin, les généraux allemands signent l’armistice. Le bilan est extrêmement lourd. 1.347 000 soldats tués, 800.000 réformés pour blessures graves.

Des milliers de monuments aux morts (2) vont être érigés sur le sol français et Rouen va avoir son lot. Dans sa séance du Conseil Municipal de Rouen, le 13 décembre 1918, sous la présidence de M.J.B. Morel (3), premier adjoint, faisant fonction de maire, le conseil charge l’administration de mettre à l’étude le projet  tendant à élever dans le cimetière Saint-Sever (4) un monument à la mémoire d’officiers et sous-officiers et alliés morts pour la Patrie ; l’affaire est lancée, nous sommes en décembre 1918.

Le 6 mai 1919, M. Lucien Valin (5), Maire de Rouen, confirme le projet, nomme un comité d’exécution et déclare les membres installés dans leurs fonctions. Après des échanges d’observations, le comité décide qu’un programme sera rédigé par une sous-commission en vue de fixer les conditions d’un concours pour l’érection du monument. Tous les artistes français sont admis à concourir.

 Nouvelle séance du conseil municipal de Rouen le 25 juillet 1919, où le conseil adopte le règlement et vote un crédit de 25.000 francs pour l’attribution de primes aux concurrents. Les choses avancent donc notablement.

 Le 16 septembre 1919, dans le Journal de Rouen, paraît l’article suivant : « Un monument Rouennais de la Grande Guerre ». Il est signé «  Un Vieux Rouennais », et il s’agit tout simplement de François DEPEAUX (1853-1920) (6) négociant-armateur-collectionneur, toujours prêt à défendre la Ville aux Cent Clochers, et les causes qui lui paraissent dignes d’enrichir son riche passé patrimonial, commercial, artistique.

 François DEPEAUX

 

« A Monsieur le Directeur du Journal de Rouen,

Monsieur le Directeur,                       

  Votre journal nous a appris que l’administration municipale Rouennaise aurait décidé d’élever dans le cimetière Saint-Sever un monument commémoratif aux officiers, sous-officiers et soldats français et alliés de la Grande Guerre, morts pour la Patrie.

  Est-ce donc là, « loin du cœur » de la Cité et hors de la vue journalière de la population Rouennaise, qu’un pareil monument devrait être érigé ?

Qu’on y élève une stèle à la mémoire des officiers et soldats qui y sont enterrés, rien de mieux, mais « le monument » qui doit perpétuer à Rouen, capitale de la Normandie l’héroïsme de nos enfants et le concours dévoué de nos Alliés, devrait, semble-t-il, pour répondre au but proposé, être édifié soit au centre de la ville, soit en un point aussi rapproché que possible de sa périphérie, d’où il puisse être vu continuellement, comme tel doit l’être, un objet de piété patriotique et de reconnaissance nationale.

  Au cœur de la ville, nul endroit ne serait mieux choisi que la place Verdrel (7), au centre de ce terreplein désolé, sans ornement et sans verdure qui, depuis longtemps, paraît attendre un monument.

  Mais, un projet moins municipal, par conséquent plus large – puisqu’il s’adresserait à la province tout entière, notre belle Normandie – consisterait à élever un grand monument, grand comme fut l’héroïsme de nos « Gars Normands », de façon à être visible de loin, de très loin, en le plaçant au sommet de la côte Sainte-Catherine dans l’ancien camp romain, peu éloigné du monument à Jeanne d’Arc – cette autre héroïne – de l’église de Bonsecours où de malheureux parents ou de veuves désolées sont venus chercher quelque réconfort et de cet hôpital où tant de nos valeureux Alliés ont souffert et sont morts.

  Placé là, « Le monument » serait vu  de dix lieues à la ronde : les voyageurs venant de l’Est l’apercevraient dès la sortie du tunnel de Tourville ; les navigateurs montant à Rouen le verraient de la courbe de la Bouille, et des plateaux du Neubourg,  du Roumois, de Canteleu,  de Mont-Saint-Aignan, de Bihorel, etc., on le verrait également.

  « Le Monument » serait un lieu de pèlerinage où chaque année à l’époque des fleurs, afin de l’en pouvoir couvrir, viendraient s’agenouiller, prier et glorifier nos morts ceux, combien nombreux, qui ont perdu des êtres chers dans le cataclysme de 1914-1918, tous ceux, plus nombreux encore qui n’auront pas oublié et les générations futures chez lesquelles le monument entretiendrait le culte de la Patrie.

  Un pareil projet devrait réunir les concours financiers des gouvernements français, britannique, belge et américain, puisque les Alliés y seraient glorifiés tout comme nos enfants ; il devrait avoir aussi celui des grandes villes et de toutes les communes Normandes, des gens patriotes et généreux de Normandie et, en première ligne, celui des innombrables parents et amis de ceux dont le souvenir est resté et restera à jamais ancré parmi nous et pour qui ce sera une consolation de les voir ainsi glorifiés.

  Pour la réputation de notre chère et vieille cité, évitons de faire quelque chose de mesquin et d’inapproprié à son but, comme tel serait le cas, d’un monument, enfermé dans les murs d’un cimetière.

  Nos communes rurales ne nous ont-elles pas donné l’exemple en plaçant la plupart des monuments qu’elles élèvent à leurs enfants morts pour la patrie dans le centre de leurs agglomérations ou sur les bords des grandes routes qui les traversent afin que tout le monde puisse les voir.

  Pourquoi la municipalité rouennaise ne ferait-elle pas comme elles ?

Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, mes sincères civilités,                                       

Un Vieux Rouennais

 

A la suite de la publication de la lettre, la direction du Journal de Rouen publia le même jour un commentaire d’une rare subtilité et diplomatie : « l’idée d’élever un monument commémoratif aux combattants français et Alliés morts pour la Patrie est dans le cœur de tous. Il en faut un au cimetière Saint-Sever mais il ne dispenserait d’un autre plus important et plus grandiose sur un autre point de la ville.

Le « Vieux Rouennais » propose comme emplacement le sommet de la côte Sainte-Catherine à laquelle on avait songé pour honorer Jeanne d’Arc ; mais, on incline plutôt maintenant à consacrer la mémoire de Jeanne d’Arc sur le lieu même de son supplice. Cet emplacement est donc libre.

Le projet du « Vieux Rouennais » serait de grande envergure mais l’effort financier qu’il imposerait ne serait pas au-dessus de ressources que réunirait une souscription ouverte en Normandie, en Angleterre et en Belgique.

Tout dépendrait, cependant, de la valeur du projet et de la faveur qu’il rencontrerait dans le public. Mais, cela sera l’affaire des artistes et la France n’en manque pas ».

 

Cinq jours plus tard, un nouvel article dans le Journal de Rouen confirme le choix du cimetière Saint-Sever et de citer l’article 4 de ce projet « les projets du premier concours devront être déposés au Musée de Peinture, rue Thiers avant le 15 décembre 1919. A titre d’indication pour le concours, la dépense totale (construction et honoraires de l’architecte chargé de l’exécution) est limité à 300.000 francs ».

Une grande amitié existait entre le négociant-armateur-collectionneur et Robert Antoine Pinchon artiste-peintre depuis 1903/1904

Robert-Antoine PINCHON

 

En 1919, le jeune artiste figurait en bonne troisième place chez le collectionneur après Henri Ottmann, Joseph Delattre. Au début du siècle avant son difficile divorce en 1906, la collection comportait une soixantaine de Sisley, vingt-trois Monet, neuf Pissarro, six Renoir, cinq Toulouse-Lautrec...  et François Depeaux dut entretenir le jeune artiste de son monumental projet. Ce rapide croquis en est la concrétisation.

Le 11 octobre 1920, François Depeaux rend son dernier soupir dans sa propriété de Lescure, située sur la rive droite de la Seine à dix kilomètres en amont de Rouen.  Georges Dubosc (8) dans la rubrique nécrologique du Journal de Rouen écrit : «...en dernier lieu, après cette longue guerre qui l’avait cassé et vieilli et avait amené son éloignement des affaires, il s’était encore occupé du monument aux morts. Alors que les emplacements étaient un peu discutés par l’opinion publique, toujours difficile à satisfaire, il avait proposé non un simple mémorial, mais un grand monument architectural au sommet de la côte Catherine où soldats et marins normands se seraient mêlés  dans une glorieuse commémoration.»

 

Georges DUBOSC

 

Le critique connaissait parfaitement l’armateur-négociant-collectionneur et cette évocation dans la rubrique montre de façon évidente que ce monument tenait énormément au cœur de Depeaux. Il fut néanmoins balayé d’un revers de main.

Pas moins de six emplacements furent proposés: Pont de Pierre, jardin Solferino, place de la nouvelle gare, place Carnot, place du Vieux Marché….

Dans le numéro 1419, vingt-neuvième année, le 13 novembre 1920, le journal havrais humoristique, artistique et littéraire  « La Cloche » (9) publie un article « Rouenneries » avec le croquis de Robert Pinchon et d’écrire: « parmi les projets de monuments destinés à consacrer à jamais la mémoire des glorieux morts de la plus terrible des guerres, signalons la conception grandiose d’un de nos meilleurs artistes Rouennais, Robert Pinchon: une croix gigantesque dominant la ville du sommet de la côte Sainte-Catherine, comme une perpétuelle et inéluctable évocation du souvenir sacré. L’artiste a bien voulu nous donner un croquis sommaire de son projet, et nous sommes heureux de donner à nos lecteurs un aperçu de cette idée – trop belle, hélas, pour être réalisée».

Deux numéros plus tard, nouvel article: « rien est encore décidé, l’on attend sans doute la prochaine guerre. Mais à chaque réunion, des conseillers reviennent à la charge et déposent sur le bureau des propositions ».

Finalement, parmi les six emplacements, un référendum de l’Union Nationale des Combattants statue  et, le 10 février …..1923 (!), le projet fut adopté avec pour emplacement, finalement,.. devant la façade ouest du Palais de Justice, au cœur de Rouen.

L’auteur du monument fut Réal del Sarte (1888-1954) qui réalisa deux autres monuments pour la ville : « Jeanne au bûcher » et « le monument des forains » place du Boulingrin.

L’inauguration eut lieu le samedi ...15 novembre 1925 ! Un feuillet « Inauguration du Monument de la Victoire », avec un poème « A nos morts glorieux », de René Roger sera lu par M. Jean Lelouar du Théâtre Français.

 

 

Après l’importante cérémonie, les combattants sont reçus à 16 heures à l’Hôtel de Ville de Rouen par le maire mutilé Louis Dubreuil, puis Te Deum à la Cathédrale, illumination du monument et enfin banquet à l’Hôtel de la Poste.

Entre le 13 décembre 1918 et le 15 novembre 1925, 7ans se sont écoulés ;   de nos jours, le monument a été déplacé lors de la construction du métro urbain ; il se trouve désormais, sur la rive gauche, place Carnot (ancienne place Saint-Sever).

    

François Lespinasse, novembre 2021

 

Notes

1) Robert Antoine Pinchon (1886-1943):artiste peintre rouennais. Voir F.Lespinasse, L’Ecole de Rouen,1980 et 1995. F.Lespinasse : Robert Antoine Pinchon, Rouen, 1990, éd. F.L, et, A. Letailleur : Robert Antoine Pinchon, Paris, éd. Connivences,1990.F.Lespinasse, Rouen, 1997, Association des Amis de l’Ecole de Rouen.

2)   Monuments aux morts: Le chiffre de 36.000 monuments en France est avancé.

3)  Jean Baptiste Morel (1851-1942): Etudes classiques à Caen, puis faculté de Droit. Docteur en droit, inscrit au barreau de Dieppe en 1877, puis Rouen en 1891. Premier adjoint au maire de Rouen dès 1902, et pendant la guerre du 2 août 1914 au 3 février 1919, le titulaire ayant été mobilisé.

4)  Cimetière Saint-Sever :Après plusieurs emplacements se fixe en 1906/1907 à sa localisation actuelle. Situé sur les communes de Petit-Quevilly et de Grand-Quevilly au sud-ouest de Rouen. S’y trouvent un monument dû à Georges Lisch (1869-1960) et les tombes de 11.436 soldats dans le cimetière britannique de la Première Guerre Mondiale.

5)  Lucien Valin (1867-1923): Avoué à la Cour d’Appel de Rouen, Conseiller général de la Seine-Inférieure, maire de Rouen en 1914 et de 1919 à 1922. Chevalier de la légion d’Honneur. Repose au Cimetière Monumental.

6) François Depeaux (1853-1920 ):Armateur-négociant-importateur de charbon, propriétaire de mine au Pays de Galles et collectionneur de tableaux. Voir F.Lespinasse, opus cités, 1980, 1995 et sous la direction de Laurent Salomé « Rouen, une ville pour l’Impressionnisme »,  F.Lespinasse « Depeaux » pages 124 à 165,Skira, 2010, F.Lespinasse « Portrait d’un collectionneur d’impressionnistes»,  Association des Amis de l’Ecole de Rouen, 2016,et catalogue exposition Musée des Beaux-arts de Rouen :  François Depeaux, collectionneur des Impressionnistes, ,In Fine, Paris, 2020. 

7)  Place Verdrel :Située au coeur de Rouen, rue Jeanne d’Arc entre la rue gare verte et le cours de la Seine, devant la façade ouest du musée des Beaux-arts, le musée de la céramique.

8)  Georges Dubosc (1854-1927)- Peintre,journaliste, historien, critique d’art, rédacteur à la Chronique, puis au Journal de Rouen. Auteur de plus de 6.200 articles et de très nombreux ouvrages.

9)   La Cloche : Journal havrais satirique, artistique et littéraire,directeur Albert-René Morice. Fin de publication en 1929. Une salle d’exposition pour artistes fut installée dans les locaux 25 rue de la Comédie, ouverte début décembre 1919 pour les artistes havrais, parisiens et rouennais.

 

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L'ALHAMBRA-THÉÀTRE DE ROUEN

8 Décembre 2020, 17:35pm

Publié par le webmaster

   L'existence de l'Alhambra-Théâtre de ROUEN fut de bien courte durée puisqu'il ne s'écoulera guère que 38 ans entre la pose de la première pierre en juillet 1906 et sa démolition en 1944 intervenant à la suite des importants bombardements sur la Ville.

   Plus éphémère encore sera sa vocation première de salle de spectacle qui fut victime d'une exploitation totalement déficiente et dut rapidement orienter son activité vers la projection cinématographique ; cette dernière remporta, il est vrai, à cette époque, un certain succès auprès du public Rouennais.

    La rédaction du blog de Amis de l'École de Rouen a le plaisir de recevoir ici à nouveau, notre  collaborateur  François LESPINASSE qui, épaulé par un ami, Monsieur Alain LAURENT, Spécialiste du Patrimoine normand, a bien voulu évoquer la conception de la salle de l'Alhambra en y associant un hommage à un jeune artiste dont la contribution à la décoration de l'édifice a été unanimement saluée par la critique : Robert-Antoine PINCHON.

Robert Antoine et sa sœur Juliette traversent la place de la République ; à droite, l'hôtel du Dauphin et d'Espagne à l'emplacement duquel sera édifié l'Alhambra (phot. 1898)

Après une époque troublée, le début du XXème siècle apparait comme un moment de paix et de croissance considérable avec de grands bouleversements économiques et culturels ; Paris compte trois cents salles de caf'conc' qui vont se transformer en music-halls avec l'introduction de spectacles et de sketches les plus divers.

Rouen n'échappe pas à ce changement avec le Théâtre des Arts, une institution Rouennaise par excellence, qui en reste l'épicentre, mais aussi le Théâtre Français , place du Vieux Marché, le  Théâtre des Folies-Bergère et la salle des fêtes du Château-Baubet, sur l'Ile Lacroix, le Salon de l'Aérogyne d'Abraham Dulaar (rive gauche) ainsi que des petites salles de spectacle et cabarets qui vont offrir à un public plus large des revues de toutes sortes.

La Situation

À deux pas du quai de Paris, de la Seine et du Pont de Pierre, se trouve la place la République.

Aux numéros 4 et 6 se dressait l'hôtel du Dauphin et d'Espagne  qui voit MONET, C.PISSARRO, SISLEY y exposer leurs toiles avec J.DELATTRE (1858- 1912) qui y rencontrera sa future épouse, Marie Cahurel, alors lingère.

Le Projet

C'est Eugène Murer, pâtissier de profession, mécène et peintre, qui acqiert  l'Hôtel en 1884. En 1887, pendant l'exposition nationale et coloniale de Rouen, 122 œuvres d'artistes impressionnistes célèbres y sont exposées. E. Murer met en montre sa collection. En 1897 il vend l'Hôtel et se consacre désormais à la peinture.

Il décédera en avril 1906.

 Le 18 novembre 1906,est constituée la Société Alhambra-Théâtre pour financer la création d'une salle de spectacles sur une idée de Raoul François, Directeur du Théâtre des Arts de Rouen en 1900-1901 et 1905.

 Victorien Lelong, architecte du projet qui fonda l'École nationale d'architecture en 1904, débute en janvier 1906 la démolition de l'immeuble en place racheté par la Société Alhambra-Théâtre. Il fait poser la première pierre de la nouvelle salle le 4 juillet 1906 et son inauguration a finalement lieu le 26 décembre en présence des personnalités, des constructeurs et des artistes chargés de la décoration sculpturale des lieux (soit 200 jours après). ! Une prouesse !.

L'Édifice

Quelques mots sur les aménagements de l'édifice décrits très précisément dans le journal de Rouen du 5 juillet 1906 :

 "la façade, placée à l'angle de la place de la République et de la rue du Closet-de-la-Madeleine sur 25 mètres, comportera un corps central en pierre blanche s'ouvrant au rez-de-chaussée par trois baies demi-cintrées au-dessus d'un perron de quelques marches. Au premier étage se développera un immense vitrail (9m. sur 4,50m.)(…). A droite, se dressera une grande tour d'angle construite en briques jaunes de Gournay et en pierre. Cette tour se terminera par une coupole ovoïde. La salle et la scène auront en profondeur 45m. sur 36m. dans sa plus grande largeur. On accédera dans la salle par un péristyle-vestibule donnant sur un bar-promenoir une hauteur de 5,50 m…"

On remarquera les trois statues d'Alphonse Guilloux symbolisant la danse et la fameuse verrière de Paul STECK dont nous parlerons plus loin...

Les Artistes

Nous ignorons par qui et dans quelles conditions E. DE BERGEVIN, E. DELABARRE, A. GUILLOUX, R. PINCHON et P. STECK ont été choisis pour décorer l'établissement. Pour le bar-promenoir, les panneaux seront réalisés par E. DE BERGEVIN (1861-1925) "Les Nymphes", R.A. PINCHON (1886-1943) "La Bouille". Le panneau de la salle "La Pomme" sera dù à E. DELABARRE (1875-1934), le grand vitrail "l'apothéose de la beauté et de la joie" sera l'œuvre de P. STECK (1866-1924) avec C. DEVISME (1848-1912) et THOREL pour verriers.

Les sculptures seront d'A. GUILLOUX (1852-1939). Ce sculpteur, né à Rouen dans une famille de sculpteurs-ornemanistes fut élève à Rouen puis à Paris avec A. FALGUIÈRE ; revenu comme professeur aux écoles des beaux-arts et d'architecture de Rouen, il est aussi beau frère d'Albert  LEBOURG (1849-1928) et possèdera deux tableaux de PINCHON ("le pont transbordeur" et "bords de Seine").

ci-dessous  la Brasserie de l'Alhambra avec à gauche une des œuvres du sculpteur Alphonse Guilloux

R.A. PINCHON est tout juste âgé de vingt ans lorsqu'il met en chantier ce très important panneau champêtre du bar-promenoir. Il choisit un motif "séquanien" à La Bouille, pittoresque village de 600 âmes sur la rive gauche du fleuve en aval de Rouen. Le peintre connait bien l'attrait que ce site a exercé sur TURNER, GAUGUIN, SISLEY et plus encore sur A. LEBOURG qui y séjourne régulièrement.

Le village attire aussi les touristes si on en croit le Guide Joane de 1894 :"on y fait la matelote d'anguilles et tout Rouen, les beaux dimanches de printemps, emplit les auberges du pays et puis, on y confit les poires et les pommes dans la pâte, ce sont les douillons.

Notre artiste, appelé sous les drapeaux, doit livrer le panneau décoratif avant le 9 octobre 1906 s'il veut bénéficier d'un service réduit à un an. Il existera deux versions de cette œuvre : l'une au pastel (anc. Coll. Dr D…) et le panneau définitif.

Robert- Antoine  PINCHON dans l'atelier de décors du Théâtre des Arts  de Rouen

Deux jours avant l'inauguration, G.DUBOSC écrit dans le journal de Rouen :

"M. Robert Pinchon, dont on connait le tempérament juvénile de coloriste ardent, ne s'est point attardé à des fantaisies allégoriques, et, en une toile très vibrante, il a restitué dans  ce panneau qui lui était confié, un des coins du "restaurant champêtre de La Bouille"…Au long de la Seine, dont les eaux miroitantes reflètent les masses des grands arbres, sous un soleil rosé rempli de lumière, sur la terrasse qu'ombragent des feuillages, des groupes élégants de jeunes femmes modernes sont restés près des tables blanches, ou debout près de la balustrade verte.

Au premier plan, une jeune femme en toilette blanche, renversée dans un rocking-chair, cause en souriant à un jeune homme dont on aperçoit dans l’ombre le panama blanc.

Bien composée et harmonieusement pondérée, cette toile très importante, où le jeune artiste s'attaquait, pour la première fois, à la figure humaine en plein air, fait honneur à M. Robert Pinchon et montre qu'on peut attendre beaucoup de ce peintre d'avenir".

Le 26 décembre 1906 à 20h30 a donc lieu l'ouverture de l'Alhambra-Théâtre avec la revue locale "Rouen qui chante" en trois actes et un prologue d'Hugues Delorme, André Dupuys et Pierre Dutreuil.

C'est l'occasion pour le public de découvrir et d'apprécier le éléments décoratifs de l'Alhambra-Théâtre qui ont fait déjà l'objet de nombreuses cartes postales éditées par les Frères Neurdein (ND Phot) à Paris.

Le bar promenoir avec à gauche le panneau "La Bouille " de PINCHON et ,à droite, "les Nymphes" de De BERGEVIN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

               détail de "La Pomme"

      Le panneau signé E. DELABARRE "La Pomme", qui surmonte la scène d'une salle pouvant accueillir 1650 personnes a aussi largement été illustré en carte postale

.

   R.A. PINCHON fera du bar  de l'Alhambra des tableaux, dont certains fort colorés, très représentatifs de l'atmosphère des lieux et , à l'évidence, inspirés de nombreuses esquisses sur le sujet...

 

Épilogue

Le 4 novembre 1907 à Neuville-les-Dieppe s’éteint Raoul FRANÇOIS, directeur pendant seulement trois mois de l'Alhambra-Théâtre.

Suite à une exploitation désastreuse (le caissier détournait les fonds, puis ce fut le directeur, en faillite, qui prit la fuite !), le dépôt de bilan de l’établissement est enregistré dès le 31 juillet 1908. Notons que la valeur de l’immeuble y est estimée à 1.219.168 francs.

Repris en 1910 par la Société Omnia, l'Alhambra devint alors le "Théâtre de l'Omnia-Pathé",puis, "l'Impérial-Cinéma", et les projections de films et leurs réclames y furent permanentes jusqu'à la seconde guerre mondiale.

Dans la nuit du 14 au 15 août 1918, le vitrail (ou verrière) de Paul Steck – qui avait dérangé bien des Rouennais empreints de moralité – fut pulvérisé par une des rares bombes allemandes qui touchèrent la ville. Il fut remplacé par un vitrail dont le sujet ne risquait plus de faire scandale :  "Jeanne d'Arc, naviguant sur un drakkar, accompagnée d'un gaulois, de Pierre Corneille et d'un poilu de 14-18" !

 François LESPINASSE, avec l'amicale collaboration de M. Alain LAURENT.

NDLR - l'Association des A.E.R. son Président Jean-Claude et son Webmestre, Jacques,  prient François de transmettre à M. Alain LAURENT leurs plus sincères remerciements pour son aide précieuse à la publication de  cet article sur le Blog de l'Association.

 

 

 

 

 

 

 

 

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les Peintres de l'École de Rouen au Musée N. POUSSIN des Andelys - Focus sur Albert LEBOURG

6 Octobre 2020, 10:32am

Publié par le webmaster

SAMEDI 10 OCTOBRE à 17 heures

en Mairie des ANDELYS (sallle des Mariages)

   M. Eric PUYHAUBERT, membre du Bureau de l'Association des Amis de l'École de Rouen, présentera une conférence sur les peintres et graveurs de l'exposition "du trait à la couleur, nuances et impressions" qui se tient actuellement sur le cimaises du Musée Nicolas Poussin dans le cadre du Festival NORMANDIE IMPRESSIONNISTE.

   Le Conférencier évoquera les œuvres de l'École de Rouen dont l'expression a été utilisée en 1902 pour la première fois par Arsène Alexandre, critique au Figaro, à propos d'Artistes intéressés par l'apparition sur le marché de l'Art des mouvements néo-impressionnisme, fauvisme et cubisme, entre 1870 et 1930.

   Ces Artistes ont réussi au travers de leurs œuvres à exprimer leur profond attachement à la terre normande ; ils se fixent sur les bords de la Seine, essayant de capter les changements aériens et les lumières subtiles émanant du fleuve. Ainsi la Seine si paisible devient leur sujet de prédilection  quand ils choisissent de fixer sur la toile les jeux somptueux de la lumière et les  mouvements changeant à chaque instant de "Dame Nature".

   Les Andelys, blottis dans un des méandres du fleuve , ont été un creuset artistique important d'inspiration pour ces peintres qui sont venus y poser leur chevalet ; Albert Lebourg (1849-1928) fait partie d'entre eux et non des moindres  (ci-contre) ; Éric PUYHAUBERT  le mettra à l'honneur dans son propos.

   Le contact pour réserver  (entrée payante) :

au 02 32 54 31 78 ou par courriel  au  musee.nicolas.poussin@ville-andelys.fr

A.LEBOURG -bords de Seine à Muids -1800x1200 coll. part.

 

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ADJUGÉ VENDU POUR DE BELLES CAUSES

3 Octobre 2020, 11:15am

Publié par le webmaster

Le LIONS CLUB D’ELBEUF organise le 11 octobre 2020 sa vingt cinquième Fête de la Peinture à l’Hôtel des Ventes de la Seine à ROUEN.

 Maître CHEROYAN a en effet, de nouveau, aimablement accepté de mettre sa salle de ventes à disposition.

    Cette traditionnelle manifestation fera l’objet le Dimanche 11 octobre à 14 H 30 d’une vente aux enchères  de plus de 150 toiles et dessins notamment des plus grands artistes de l’Ecole de Rouen, tels C.ANGRAND-E.BOUDIN- L.BORDES -M.COUCHAUX-M.DENIS- JP.DUBORD- P.DUMONT-A.DUNET - M.FRECHON - N.GUILBERT -N.HENOCQUE-R.LAVOINE- A.LEBOURG - P.LE TRIVIDIC-M.LOUVRIER- A.MALET- P.MASCART- M.NIQUET- RA.PINCHON- R. SAUTIN- R.SAVARY -G.SEBIRE-A.SEGERS -J.THIEULIN-E.TIRVERT-M.VAUMOUSSE ……. ainsi que de peintres régionaux au talent reconnu tels que J. LEBOURGEOIS, J.P.DUBORD, D.GUILBERT

 

     Il convient de noter que de nombreuses toiles proviennent de collections privées prestigieuses, leurs propriétaires ayant accepté de participer à cette vente caritative.

    La vente sera dirigée par Me Guillaume CHEROYAN, Commissaire Priseur à Elbeuf et à Rouen, assisté de Jean Claude DELAHAYE

     Il est important de préciser qu’il n’y a pas de frais en sus de l’enchère pour cette vente.

    Le produit de cette manifestation sera consacré à aider des enfants de familles défavorisées de l’Agglomération Elbeuvienne, ainsi qu’à financer des actions dans le cadre de la COVID 19.

    Dans le respect des gestes barrières et des dispositions préfectorales, vous serez les bienvenus à la salle des ventes de la Seine, située 40 rue Victor Hugo à ROUEN, où les œuvres mises en vente seront exposées le samedi 10 octobre  de 14h à 18h et le dimanche 11 octobre de 10h à 12h.

La vente se tiendra sur interencheres.live et au téléphone et le nombre de personnes autorisées à assister à la vente sera déterminé en fonction de l’arrêté préfectoral en vigueur à la date du 11 octobre.

Le catalogue de présentation de ces œuvres ainsi que les conditions de vente sont sur :

www.hdvs-encheres.com

et

www.hdvs-interencheres.com

 

 

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le Musée Municipal de LOUVIERS (Eure) expose...

12 Septembre 2020, 14:31pm

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Le 29 septembre 2019, nous avions publié dans les pages de ce blog une information communiquée par M. Michel NATIER, Conservateur du Patrimoine et Directeur du Musée Municipal de LOUVIERS (Eure), concernant la préparation au Musée d'une importante exposition dans le cadre du Festival Normandie. Impressionniste 2020.

Malgré les difficultés provoquées par la pandémie COVID-19, cette présentation intitulée intitulée "de l'aube au crépuscule, couleur impressionniste" a pu se dérouler cette année comme prévu, dans une salle du Musée dédiée à l'École de Rouen.

On peut y voir en ce moment, tous les jours, sauf le mardi et jusqu'au 15 novembre 2020, de 14h à 18h. des  œuvres de grands Maîtres de l'impressionnisme.

Nous vous signalons qu'exceptionnellement, dimanche 20 septembre, un membre du Bureau de l'Association des Amis de l'École de Rouen sera présent à 14h,15h et 16h30 pour vous guider et commenter les œuvres exposées.

contacts - 02 32 09 58 55 et www.ville-louviers@fr

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Un sympathique message d'un membre de notre ASSOCIATION

26 Août 2020, 09:37am

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     Jacques GUÉRIN, Membre de l'Association des Amis de L'École de Rouen depuis sa création en 2003, vient de nous adresser un message via notre Président, Jean-Claude Delahaye, pour solliciter l'aide des lecteurs de notre blog.

 

     Jacques GUÉRIN s'est engagé en effet, depuis quelques années, dans la recherche de documents avec comme but d'élaborer un dossier monographique sur la carrière de Georges BRADBERRY, Artiste peintre Rouennais né en 1878 et décédé en 1959.

      Il a déjà rassemblé de nombreuses informations pour son projet, mais il estime que le résultat de sa quête est insuffisant pour une publication ou l'organisation d'une éventuelle exposition.

G.Bradberry-"intérieur de chaumière"-pastel 0,90x0,75 sbd

.    

      Notons que François LESPINASSE, consulté à ce sujet par notre Ami, écrivait déjà dans son ouvrage "JOURNAL DE L'ÉCOLE DE ROUEN" (Édition novembre 2006 - page 256) :  "espérons qu'un jour une rétrospective Georges BRADBERRY fera toute la lumière sur le talent de ce pastelliste et de cet artiste étonnant". *

 

         Jacques GUÉRIN, qui fait écho à ce souhait, ajoute enfin dans son appel à nos lecteurs :

 

"je ne doute pas que de nombreux Amis de l’Ecole de Rouen possèdent des œuvres, des documents, des témoignages

ou des relations qui…

S’ils acceptaient de partager ces sources, j’en serais très heureux".

 

iIlustration extraite de l'ouvrage de F.Lespinasse - Journal.de l'école de Rouen -Ed. nov. 2006 - p. 257

 Expos : -  Musée des Beaux-Arts Rouen - 7ème expo du Salon des Artistes Rouennais  -1913 n°67 

             -    Rouen Hôtel du Département -    "Toiles en Seine"    Oct. - nov. 2005

 

Vos réponses sont à adresser à : guerin.jacques2006@orange.fr - tel : 06 85 52 77 30

avec nos remerciements - Le webmestre J.BASSET

 

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Notre Ami François LESPINASSE a fêté le 12 juin 2020 les quarante ans de la sortie de son ouvrage "L'ÉCOLE DE ROUEN"

20 Juillet 2020, 10:57am

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Après le commissariat scientifique de l'exposition François DEPEAUX ouverte depuis le 11 juin au Musée des Beaux-arts de Rouen, François LESPINASSE est actuellement en pleine préparation de l'exposition Robert-Antoine PINCHON qui doit se tenir du 10 juillet au 19 septembre au Musée des Franciscaines de DEAUVILLE ; elle va regrouper 80 tableaux,un cabinet de dessin et des vitrines.

    la préparation du catalogue de cette manifestation l'a amené à rechercher des documents sur un ami qui fut très proche de l'artiste Rouennnais : Paul PITRAIS, dit Pol Pitt (1885-1921), marchand de cuirs, peintre et surtout caricaturiste. Pol pitt a sorti son dernier album "LE DEAUVILLE DE 1920" il y a donc 100 ans, et nous sommes heureux  de vous présenter dans notre blog des Amis de l'École de Rouen quelques lignes de François LESPINASSE sur le sujet .

 

    La station de Deauville nait en 1860 à l’emplacement d’un marais. Elle est la volonté d’un trio de visionnaires à la tête duquel se trouve le duc de Morny, demi-frère de Napoléon III et petit-fils de Talleyrand qui décident d'engager sur place des projets d'investissements audacieux : hippodrome de La Touques après assèchement des marécages, gare de chemin de fer en 1863, parcours de golf en 1899.

   Ainsi, le second Empire va favoriser le développement du site mais les évènements de la fin du siècle en France entraînent bientôt son déclin. Ce n’est qu’au début du XXième siècle que la Station entame son renouveau avec la construction sous l’impulsion du comte Le Marrois de l’hippodrome en 1911 puis d’un imposant Casino sur les plans de l’architecte Georges Wybo en 1912, et, la même année, de deux superbes impressionnants hôtels de luxe qui furent malheureusement réquisitionnés pendant la première guerre mondiale pour servir d’hôpitaux.

   Après ces années dramatiques surviennent les Années folles, où toutes les personnalités les plus riches de tous les continents se retrouvent dans cette petite ville " La Plage Fleurie" où il faut être présent et vu en particulier lors de " la Quinzaine de Deauville" ! 

  C’est dans ce contexte qu’il y a très exactement cent ans, un certain Paul Pitrais (1885-1921), dit "Pol Pitt", va faire paraître en 1920, un album « Le Deauville de 1920 » préfacé par Michel Georges-Michel, pseudonyme de Michel Georges Dreyfus (1883-1985).

   Ce fascicule illustré de quarante profils a précédé de plusieurs autres édités avant le premier conflit mondial : « En Bourse – Le Havre » (1909) « Au Conseil Général » « Concours hippique »  « Au Pesage - Courses de Rouen 1909 » puis deux autres ayant pour sujets les visiteurs de la station balnéaire, devenue alors célèbre, ainsi que « Croquis Express » (1909) avec dix-sept caricatures et «  Le Deauville de 1912 » avec cette fois vingt-huit caricatures et publié le 17 août 1912.

   Pour la préface de son dernier album « Le Deauville de 1920 » Pol Pitt choisit de faire appel à Michel Georges Michel, peintre, journaliste parisien, écrivain de plus de cent ouvrages, dont le plus connu « les Montparnos ». Il fut aussi romancier traducteur, et directeur de la revue « Le Cri de Paris ».

      Dans sa préface, M.G. Michel écrit : " Deauville, comme avant la guerre, est toujours composé d’un hôtel et d’un casino entre lesquels il y a une rue. Cette rue, en dépit des gloires nouvelles, a gardé le nom du comte Gontaut-Biron, et les gens s’y cherchent comme avant, de midi à 14 heures. Mais ce ne sont plus les mêmes gens… " . Il termine ainsi son envoi : " quelques beaux vétérans d’avant-guerre de 70, parmi ces corsaires devenus banquiers : Hennessy, mélancolique, Nahmias, la lèvre dédaigneuse, les pouces dans les entournures, le regard ne dédaignant pas faire le tour de table… ".

    Pol Pitt y dessine pêle-mêle gentilshommes et forbans au jeu, forbans ou pire s’il était honnête d’ainsi faire fortune dans l’abominable tragédie d’hier. Il saisit les instants cruels ou ironiques de ces physionomies qui sont peut-être telles qu’elles étaient au temps où leur fortune ne se jouait pas encore dans les salons de cercle.

    Grâce au précieux exemplaire personnel et "aquarellé" de Pol Pitt, qui porte les noms des "caricaturés", il a été possible de repérer les personnages les plus en vue de cette publication ; citons : Ernest Cornuché, James Hennessy, le Commandant Langlois, Nahmias, l’Agha Khan, Cohn, Nicolopoulos, Tristan Bernard, le Maharadjah de Kaputalah, Kees Van Dongen, Jean Guitry, Jouinot-Gambetta, Vagliano, Papazian, Gugenheim, Van Dyck, Georges Blumenthal, Nataf, Lucien Cahn…

    C’est un très impressionnant tour d’horizon de toutes les personnalités les plus riches et les plus en vue du monde entier, qui vont venir sur la côte normande attirées aussi par le jeu, les tournois de bridge et, le golf, les courses hippiques, ainsi que le polo.

 MAIS QUI ÉTAIT   POL PITT  ?                                   

 

   Paul PITRAIS (1885-1921), dit "POL PITT", est né à Paris le 23 mars 1885. Son père Albert Napoléon PITRAIS, né à Pont-l’Evêque, s'installe à Paris vers 1870 comme représentant en cuirs. La mère de Paul décède l'année de sa naissance. Il perd son père à 10 ans. Après sa scolarité, son tuteur l'emmène à Rouen et l'inscrit à l'École Supérieure de Commerce d’où il sort diplômé en 1904.

Le jeune homme reprend alors le commerce florissant de cuirs et matières tannantes de son père.

   En octobre 2006 il est incorporé au 39ième RI d'infanterie à Rouen où arrive quelques jours plus tard Robert Antoine PINCHON, qui,  lui, ne va faire qu’un an de service militaire.

    Pol Pitt ne sera libéré qu'en octobre 1908. Il va alors partager sa vie désormais entre le commerce de cuirs et la caricature.  Mais les amis ne se quitteront plus... 

    Il obtient de participer à la seconde exposition de la Société des Artistes Rouennais de 1908 et expose ensuite régulièrement prenant une place désormais enviée dans le milieu artistique local.

Pol Pitt et Robert-Antoine PINCHON  à Trouville                          Pol Pitt  militaire

    Pol Pitt  aide ses amis peintres et se constitue aussi une remarquable collection.

 

 

Grace à sa situation aisée, Pol Pitt aide ses amis peintres et se constitue une remarquable collection.

   quelques amis peintres croqués par l'artiste 

 Ch.Angrand (1854-1926) L.Suzanne (1870-1923) N.Guilbert (1878-1942) P.Dumont (1884-1936)

   L'année suivante, il publie son premier album « Le Havre en Bourse,»; d’autres vont suivre... 

    Mais survient la guerre en 1914 ; mobilisé le 4 août, Pol Pitt passe une partie des hostilités à Lisieux, expose au Manoir Huchon, se marie à Rouen en 1915, puis finit sa période militaire à Marseille comme expert en cuirs. Il est libéré enfin le 19 mars 1919.

 Le 20 novembre 1920, il est nommé Président des Artistes Rouennais. Sa carrière s'arrête malheureusement là. Il décède en effet le 7 février 1921 à l’Hôpital de Sotteville-les-Rouen à l’âge de 34 ans.   

QUELQUES PERSONNAGES DE L’ALBUM  "LE DEAUVILLE DE 1920"

 

Eugène Cornuché 1867-1926   

Fils d’un marchand de vins, débute comme serveur et va gravir avec un exceptionnel brio tous les échelons pour devenir le propriétaire du restaurant « Maxim’s » et du Casino de Deauville en 1909. Il sera surnommé le « Napoléon des restaurateurs »..

 

 

Kees Van Dongen 1877- 1968

Peintre néerlandais naturalisé français. Vient à Paris en 1897, puis 1899.Expose en 1904 au Salon des Artistes Indépendants. Il est considéré comme un peintre « fauve » anarchiste et mondain. Passe son premier été à Deauville en 1913 et durant les Années folles il adopte totalement Deauville.

 

 

 

Tristan Bernard 1866-1947

Romancier et auteur dramatique français. Quelques formules et mots d’esprit ont fait sa célébrité. On retiendra ici : « c’est vraiment difficile à dire aux gens qu’on les aime quand on les aime vraiment » ou  « Deauville c’est près de Paris, mais loin de la mer ».

En 1912, pour l’ouverture du Casino, il visite Deauville pour la première fois, et restera fidèle à la Plage Fleurie.

Aga Khan 1877-1957

Quarante-huitième Imam des ismaéliens nizarites. Succède à son père à l’âge de huit ans. Dans les années vingt, il quitte l’Inde pour l’Europe avec une passion pour les chevaux de course. Propriétaire d’une importante écurie de course, il gagne à deux reprises le prix de l’Arc de Triomphe.

 

 

Solly Joel 1865-1931

Né à Londres, part vers 1880 pour l’Afrique du sud où il va faire fortune dans les mines de diamant. Il devient un brillant financier dans les mines, brasseries et les chemins de fer. Il possède aussi une importante écurie de course.

 

 

 

 

George Blumenthal 1858-1941

Né à Dusseldorf, il émigre aux Etats-Unis, banquier, il va diriger la branche américaine de la banque Lazard, dont il se retire en 1901. Philanthrope, il soutient activement le Metropolitan Museum de New-York. Il fut aussi président de l’Hôpital Américain de Paris

François LESPINASSE  juillet 2020

article mis en page par le webmestre Jacques BASSET

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Le MUSÉE DES BEAUX-ARTS DE ROUEN met à l'honneur LÉON-JULES LEMAÎTRE pour la première fois, sur ses cimaises…

23 Mai 2020, 10:08am

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     Dans la dernière parution en février du blog de l'Association des Amis de l'École de Rouen, nous avions eu le plaisir, en avant-première d'une exposition par le musée des beaux-arts de Rouen d'œuvres de Léon-Jules. Lemaître, de vous présenter un article de notre Collaborateur H. Priaucey qui évoque l'évolution de la carrière de l'Artiste.

    Décalée en raison des évènements dus au Covid-19, l'exposition au MBAR des œuvres du Maître de l'Impressionnisme normand n'ouvrira ses portes probablement que mi-juillet.  En prévision de cet évènement important qui s'inscrit dans le cadre de "Normandie Impressionniste 2020", l'Association a décidé de financer la parution d'un ouvrage de présentation des tableaux exposés.  

      Cet ouvrage, réalisé par notre ami François Lespinasse, vient de paraître sous le titre "LÉON LEMAÎTRE". Il comporte 100 pages avec 70 tableaux reproduits et coûte 20 €.

     Vous pouvez le commander dès maintenant au siège de l'Association : "les Amis de l'École de Rouen" - 437 rue de Griolet - 76320 St-Pierre-lès-Elbeuf.

       Vous trouverez ci-dessous l'image de la couverture de ce livre que nous vous recommandons d'acquérir… avant votre visite.

Le Webmestre.

 

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A PROPOS DE LA PROCHAINE RETROSPECTIVE LEON-JULES LEMAITRE au MBA de ROUEN

10 Février 2020, 12:05pm

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En prévision de l'exposition Léon-Jules Lemaître au Musée des Beaux Arts de Rouen dans le Cadre de Normandie-Impressionniste 2020, notre rédacteur, Hubert Priaucey, nous propose une étude comparative des deux périodes de création de notre peintre. En effet, autour des années 1890, il change très significativement de style, la cause en étant de la médiocre réussite commerciale des dix premières années de sa carrière artistique.

L'amateur-lecteur de cette rubrique pourra ainsi bien appréhender la remarquable exposition qui se prépare.

  Léon-Jules Lemaître entre à l'Ecole de peinture et de Dessin de Rouen en 1870. Grâce à ses bons résultats, il obtient une bourse et intègre l'atelier parisien de Gérome qui lui enseigne un dessin rigoureux bien reconnaissable toute sa carrière durant. Mais, "sombrant dans l'impressionnisme" au contact de l'avant-garde parisienne, la Ville de Rouen lui supprime sa bourse. De plus, LJ Lemaître est considéré comme le responsable de la conversion de ses jeunes amis peintres rouennais au "Plein-airisme" !

    Le succès n'est pas au rendez-vous et il ne vend que très peu, presque uniquement des copies de tableaux du Louvre et des portraits de commande (à l'instar de Renoir à ses débuts). Une dizaine d'années difficiles s'écoule, mais à partir de 1890, il se tourne vers des compositions montrant le Vieux Rouen animé de personnages singuliers.

     Or, durant la 1ère partie de sa carrière, c'est à dire de 1879 à 1890 environ, il produit des œuvres baignées d'un impressionnisme doux, à la touche bien présente. Dans plusieurs d'entre elles, il crée des compositions nacrées (Cf. le Bord de Seine du Musée de Louviers), compositions nacrées qu'il réutilisera à l'envi dans la deuxième partie de sa carrière.

  Essayons dans cet article de bien différentier ces deux périodes :

   le Motif : autant dans la première partie (avant 1890), il explore des paysages champêtres ; autant, après 1890, la quasi totalité de son œuvre représente des scènes urbaines, Rouen bien évidemment, mais aussi Paris, Dieppe, Darnétal, Elbeuf...

avant 1890...                                                                                                                après1890...

 

   Le Style : autant avant 1890, il est au fait du mouvement impressionniste, et même divisionniste (Cf. Le jardinier, daté 1889, décès de Seurat en 1891) ; autant après 1890, il n'est plus en phase avec l'avant-garde ; mais pourrait-on dire qu'il invente un style ?

avant 1890...                                                                              après 1890...                                                         

                                     

   Le Chromatisme : autant avant 1890 il emploie, certes avec parcimonie, une palette colorée (Cf. Le Marché aux Fleurs 1889) ; autant après 1890, sa palette est nacrée, grise, dont les Rouennais reconnaissent bien la météo ambiante ; palette terne qui lui sert admirablement à bien faire ressortir ses personnages aux couleurs de leur profession ou de leur activité.

avant 1890...                                                                                                             après 1890...

   L'Animation : autant avant 1890, il ne fait vivre que très peu de personnages ; autant après 1890, ses œuvres grouillent de petits personnages caractéristiques de la vie sociale contemporaine (mitron, commis, élégantes...), en omettant volontairement les nécessiteux qui pourraient repousser les acheteurs éventuels ; c'est une représentation "bon ton", idéalisée, de la société de la fin du XIXème, non réaliste (comme la décrivent les photographies de Faugas du Musée de Louviers). Ces compositions pourraient paraître comme un guide touristique de la cité médiévale rouennaise, peuplées de personnages locaux aux métiers locaux, comme Ridgway Knight le fait à la même époque pour le marché américain prônant une Normandie exotique.

avant 1890...                                                                                    après 1890...

                                                                             

   La dimension des toiles : variée avant 1890, ses petits panneaux verticaux en acajou d'après 1890 sont la grande majorité de sa production ; faciles à vendre, faciles à crocher au mur, prenant une place modeste, ils séduisent les amateurs du Rouen patrimonial qui peuvent ainsi se créer une collection qui ne prend que peu de place.

   L'intérêt : autant aujourd'hui les œuvres d'avant 1890 sont rares, non pas qu'elles ne soient pas recherchées, mais peu comprises et donc sous évaluées ; autant celles d'après 1890 sont prisées, à la côte sûre voire prévisible.

 

                                                                     Hubert PRIAUCEY

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